APRÈS LA PLUIE C'EST LE...
Fort souvent on entend dire qu’après la pluie, c’est le beau temps.
Dicton très peu universel car il ne s’applique certainement pas à la
Grand’Anse. En effet Six mois après l'ouragan Matthew, qui a tout
emporté sur son passage , même l'espoir, la population est livrée à
elle-même. Réfugiés dans des grottes, affamés au point de se nourrir
de « rage », les habitants de cette région ont fait un saut dans le
temps. L’âge des cavernes est désormais d’actualité. Triste.
La situation humanitaire actuelle de la Grand’Anse est précaire et
risque d’empirer, a averti le Bureau de la coordination des affaires
humanitaires des Nations unies. Pourtant au milieu de ce désespoir,
240 millions de gourdes ont officiellement été dépensées dans des
festivités censées apporter un mieux-être dans les régions dévastées.
Cela ressemble étrangement à une maxime que Machiavel lui-même aurait
pu énoncer: S’ils ont faim, fais-les danser. S’ils se plaignent,
fais-les danser. S’ils meurent…
Dans cet état de détresse généralisée, rien d’étonnant que l’on
s’accroche aux « zen » et rumeurs de toutes sortes, comme dans une
tentative ultime de se soustraire à l’énervante réalité du pays. Des
lacunes abyssales de certains hauts fonctionnaires de l’état en langue
française, en passant par les penchants pervers de certains autres, il
y a de la matière. Le président de la République qui nous dévoile les
faiblesses de l'État (tu m’étonnes), et des parlementaires
désespérément piètres complètent le tableau. Buzz. Buzz. Buzz. Pendant
ce temps là des compatriotes se battent pour vivre.
"Il m'est toujours difficile d’imaginer ma ville dans cet état,Jérémie
savait nourrir la capitale, maintenant elle n’est pas en mesure de
prendre soin d’elle-même", dénonce Judith, habitante de Jérémie, en se
référant aux prix des produits de première nécessité qui ne cessent de
grimper depuis la catastrophe. En effet, ce département était
considéré tout à fait légitimement comme le grenier d'Haïti!
Jusqu'à quand la Grand'Anse sortira t-elle de sa grotte? Quand
sonnera-t-on la sonnette d'alarme? Ne sera t il pas trop tard?
Personne ne le sait. Personne ne cherche à le savoir. On peut
comprendre, il y a tellement de sujets plus juteux et inutiles
auxquels se raccrocher, pourquoi se remettre en question? Le jour où
on cessera de jouer à l'autruche, ce ne sont pas seulement les
victimes des catastrophes naturelles qui en bénéficieront, mais toute
une nation! Ce beau-temps qui reste jusqu'à présent à l'état de
fantasme, pourrait même devenir réalité ...
Staël Nirvania ANTOINE
Étudiante en Sciences Juridiques.
